Édito de la Lettre électronique du 4 juin 2024
AA – . La faute à qui ?
Le 31 mai dernier, l’agence Standard & Poor’s dégradait la note de la France, sanctionnant ainsi la détérioration de la position financière et budgétaire française, affirmant ne pas croire au retour du déficit sous les 3%, d’ici 2027.
Paradoxalement le 23 mai, l’Express titrait « Notre stratégie est la bonne, selon Emmanuel Macron. » Ce dernier prétendait, haut et fort, que la dérive des dépenses était du fait des collectivités, sans aucun dérapage du côté des dépenses de l’État…
Nombre d’entre nous se sont émus de tels propos, tenus par un Président qui « pèse » 3 100 milliards d’euros d’endettement et boucle les fins de mois de la France à coups d’emprunts.
Les collectivités, elles, on le sait, sont tenues de respecter la fameuse règle d’or consistant, non seulement, à équilibrer leur budget mais surtout à n’emprunter que pour financer l’investissement et, en aucun cas, du fonctionnement. Rappelons que la dette des collectivités reste stable, depuis 1995, autour de 9% du PIB alors que la dette de l’État s’envolait, de 40% à 89,7% du PIB. En bref : « Faites ce que je dis, pas ce que je fais… »
Que dire des charges transférées sans compensation, comme l’instruction du « droit des sols » ou l’aumône que représentent les quelques milliers d’euros sur les passeports ou les CNI. Gémapi nous impose de taxer nos habitants et nos entreprises et surtout d’en porter la responsabilité. La ZAN vient balayer d’un revers de main la libre administration de nos territoires. La suppression de la Taxe d’habitation, compensée sans aucune dynamique, a pour effet de laisser supporter le poids de la fiscalité aux seuls propriétaires pour des services publics offerts à tous… et bien d’autres exemples qui nous laissent perplexes et déçus de ce manque d’égards de la part d’un gouvernement bien maladroit.
A l’heure où un énième rapport sur la simplification sort sous la plume d’Éric Woerth, revendiquant de « donner aux élus les moyens de pourvoir à leurs ambitions », en prônant une nouvelle étape de décentralisation, pouvons-nous espérer que l’Etat s’en saisisse et que ce texte n’aille pas rejoindre la pile de ceux déjà parus et classés sans suite ?
Au moment où, le Maire de Charleville-Mézières, Boris Ravignon, met sur la place publique son rapport sur le mille-feuilles administratif dans lequel il estime à 7,5 milliards d’euros, le « coût des normes et de l’enchevêtrement des compétences entre l’Etat et les collectivités », n’est-il pas temps d’avoir le courage de réformer ? Nos échelons territoriaux, qui sont le fait de notre histoire, ne sont pas nécessairement à supprimer mais plutôt à conforter dans leur efficience en les responsabilisant pour un objectif commun : remédier à l’impuissance publique.
Contrairement aux affirmations présidentielles, ce n’est pas la gestion des collectivités locales qui détermine l’appréciation des agences de notation. Que nous soyons AAA, AA-, A+, Il importe que les élus locaux retrouvent leur pouvoir d’agir et leur autonomie financière. Ceux qui du matin au soir, voire la nuit, sont à la manœuvre, connaissent les besoins de leur population, s’efforcent, modestement mais impérieusement de les satisfaire et contrairement à ce qui se passe dans d’autres sphères du pouvoir, ont tendance à mettre leur ego dans leur poche.
A la veille d’une élection bien éloignée de nos préoccupations quotidiennes souhaitons que chacun puisse faire un choix en son âme et conscience en privilégiant l’intérêt général et donc l’avenir de notre Pays qui, bien trop souvent, s’avère être plus européen que l’Europe elle-même !
Pauline MARTIN, sénatrice
4 juin 2024