Chapitre 5 – Les Français
Le monde entier est aujourd’hui confronté à la même triste situation. Et chaque peuple réagit selon « son tempérament » et sa culture. Cela me fait penser à cette formule de Winston Churchill qui disait en 1962, il y a près de soixante ans : En Angleterre, tout est permis sauf ce qui est interdit. En Allemagne, tout est interdit, sauf ce qui est permis. En France, tout est permis, même ce qui est interdit. En URSS, tout est interdit, même ce qui est permis.
Les Français, fidèles à leur image, ont d’abord pris avec légèreté les consignes du gouvernement. Il faisait beau, ce n’était « qu’une grippe », et puis être ensemble, partager, profiter, c’est notre mode de vie. Le Président de la République, lors de son intervention télévisée du 16 mars, à l’audience record, a dû monter d’un cran la gravité de son message et édicter des règles plus strictes, face à ce peuple culturellement rebelle et transgressif. Le confinement était imposé, la guerre sanitaire était déclarée. Fini l’indiscipline et l’insouciance.
La France s’est muée, du jour au lendemain, en un pays docile, et les Français en un peuple discipliné et uni. Persistent, certes, des exceptions ici ou là, mais tous nous pouvons constater des files d’attente ordonnées et respectueuses des obligations, des rues vides et la disparition des réunions et des sorties en groupe. Sans nul doute, la peur est la précieuse alliée de ce nouveau comportement. Les gens se croisent en faisant un détour et les échanges sont réduits au strict nécessaire. Les masques qui font si cruellement défaut aux soignants sont devenus étonnamment l’attribut de nombreux clients des supermarchés. Où les ont-ils trouvés ? Il reste décidément quelque chose des habitudes françaises !
Mais la France c’est d’abord tous ceux, en blouse blanche, qui bravent leur peur, qui dépassent leur fatigue, qui se dévouent sans compter et qui font face à leur responsabilité, à leur devoir. Ceux-là, ils se mobilisent et répondent présent d’une façon remarquable. C’est notre grandeur aujourd’hui.
La France, c’est cet élan de solidarité sans égal : des actions concrètes comme celles des chefs d’entreprises qui ont remis leurs stocks de masques et de gants aux hôpitaux, ou encore comme celles des dirigeants d’usines qui ont modifié leur production et adapté leurs chaînes de fabrication pour fournir du gel hydroalcoolique et des respirateurs. Ce sont aussi les élus qui poursuivent inlassablement leur mission, au service des habitants. C’est l’Armée qui se mobilise dans le cadre de l’opération « Résilience ». Ce sont les enseignants qui, de façon volontaire, viennent garder les enfants des personnels soignants. Et puis, ce sont toutes les actions du quotidien : ici pour faire les courses d’une voisine isolée, là pour proposer ses services aux associations de la solidarité. Ce sont des gestes symboliques, qualifiés par certains de démagogiques, comme d’applaudir chaque soir à 20h tous ceux qui soignent parfois au péril de leur vie. Ce témoignage si simple d’une attention et d’un soutien crée un nouveau lien entre voisins dans cette période de « distanciation sociale ».
Oui, la France n’est pas seulement celle qui casse et dégrade, c’est aussi et surtout celle de l’attention à l’autre, celle des gens responsables et civiques qui s’unissent contre un péril. La fraternité n’est pas qu’une devise au fronton des mairies. Comme toujours, lorsqu’il est confronté à des évènements douloureux de son histoire, le pays est grand.
Après la crise sanitaire viendra la crise économique, et cet esprit généreux et solidaire, il faudra le conserver, faire bloc et union, malgré les épreuves. Car c’est la France qu’on aime.