Chapitre 7 – Sortir du confinement
14 avril 2020. Après un mois de confinement, chacun espérait, sans trop y croire, le retour à la liberté perdue. Proche d’un état de vacances pour certains, cette période est plus difficile pour d’autres. Je pense d’abord à celles et ceux qui subissent la violence d’un conjoint. Je pense aux enfants maltraités, victimes de parents irascibles et violents. Je pense à toutes les familles qui n’ont pas la chance de vivre dans une maison ou un appartement spacieux, pour lesquelles la promiscuité devient une épreuve. Et puis mes pensées vont également vers les personnes seules qui subissent douloureusement cette parenthèse. Tous attendent avec impatience de retrouver une vie normale et les activités passées. Il est à craindre que le confinement crée des situations de rupture, parfois l’éclatement de la famille; mais c’est un autre sujet.
Si le rôle d’un exécutif est de prendre des décisions, celles auxquelles sont confrontés nos gouvernants ne sont pas des moindres. Face à un péril sanitaire et un autre économique, ils doivent arbitrer. Éclairés par de nombreux experts, ils ont la lourde responsabilité de trouver la juste mesure entre les risques humains et économiques. Les deux pouvant par ailleurs se rejoindre en certaines circonstances.
On le sait, le déconfinement ne sera pas synonyme de disparition de l’épidémie. Plus que jamais, les gestes barrières devront être observés avec une absolue rigueur et conjugués au port obligatoire du masque. Ces mesures individuelles qui font appel au civisme et au respect des consignes devront être associées aux techniques de dépistage sérologique et virologique, voire au traçage numérique. C’est à ces seules conditions et à leur respect qu’il sera raisonnablement possible de sortir de ce singulier épisode. Il y va de l’intérêt de tous, car, plus la période de confinement durera, plus l’économie nationale sera altérée, entraînant un cortège de faillites, de licenciements et les difficultés sociales inhérentes.
C’est ce qu’a assumé le Président de la République ce lundi lors d’une intervention télévisée. Hormis les personnes âgées, handicapées et les malades chroniques, c’est le 11 mai, soit dans quatre semaines, que le confinement du plus grand nombre de nos concitoyens devrait prendre fin. C’est à cette même date que les écoliers, collégiens et lycéens retrouveraient progressivement le cours normal de leur scolarité.
La société française devra être solide sur ses fondements pour que la nation reste unie. C’est évidemment indispensable, car si une crise sociale majeure devait se cumuler à la crise que nous connaissons et à celle que nous prévoyons, alors, sans aucun doute, l’avenir serait sombre. Des appels à manifester le premier samedi qui suivra le déconfinement ont déjà été lancés par des mouvements extrémistes. Ces incitations sont irresponsables, leur application serait coupable.
Comme après les grandes fractures de son histoire, la France, cabossée, appauvrie, pour se relever devra compter sur le sens des responsabilités et le courage de chacun. Notre société allait mal depuis trop longtemps. Trouvons dans cette crise inédite les ressorts pour fonder un projet ambitieux de cohésion nationale. Gommer les injustices, réduire les inégalités, imaginer une société en accord avec les enjeux de son siècle, faire œuvre commune, telles sont quelques-unes des priorités auxquelles nous devons nous atteler. Le chef de l’État a fait une part d’autocritique, et a tracé en creux de grandes lignes de transformation auxquelles peuvent adhérer le plus grand nombre. Mais si les Français rejettent tant la classe politique, c’est parce que les actes se sont rarement conformés aux paroles. Souhaitons que les déclarations soient suivies d’effet, qu’aucun mot prononcé et donc qu’aucun mot entendu ne soit illusoire. Oui, de cette pandémie peut naître un vaste projet dont les femmes et les hommes formeraient le cœur, dont ils seraient la raison, les acteurs et le but. Si, comme l’écrivait en 1859 Émile Augier, auteur et sénateur du Second Empire, « l’espoir est une transaction du rêve avec la réalité », alors agissons et espérons !