Ma réponse à la sollicitation des « Gilets Jaunes » pour la destitution du Président de la République
Madame, Monsieur,
Ces derniers jours, vous avez bien voulu me solliciter directement en me demandant de participer au lancement de la procédure de destitution du Président de la République par le Parlement.
En droit constitutionnel, l’article 68 alinéa 1 de la Constitution de la Vème République dispose que : « Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour. ».
Comme le prévoit la jurisprudence constitutionnelle, le « manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat » concerne les faits de Haute trahison (par exemple), de maladie grave ou de folie mentale avérée. L’alinéa 1 précise bien la destitution du Président ne peut être engagée qu’aux seules raisons précitées. Aucun de ces trois cas n’est aujourd’hui constaté.
Même si, comme vous, je ne partage pas la politique sociale mise en place par le Gouvernement, ainsi que les déclarations parfois maladroites ou provocantes du Président de la République, les désaccords politiques de fond ou de forme ne peuvent justifier, à eux seuls, le déclenchement de la procédure de destitution.
En conséquence et en vertu des dispositions prévues par notre Constitution, les conditions ne me paraissent pas réunies pour déclencher la procédure de destitution à l’encontre du Président de la République.
Toutefois, je comprends les raisons de votre colère ainsi que les difficultés auxquelles les Français sont confrontés chaque jour, en particulier dans les territoires ruraux et périurbains. L’incompréhension face à un pouvoir exécutif qui reste sourd à ces problèmes est légitime et le ras-le-bol fiscal est réel.
C’est pour cela que le Groupe Les Républicains au Sénat a choisi dès le 26 novembre dernier de supprimer la hausse des taxes sur le carburant prévue dans le budget de l’Etat et a demandé au gouvernement de ne pas revenir sur cette disposition adoptée par le Sénat. Depuis, l’Elysée a décidé d’annuler les taxes qui devaient entrer en vigueur au 1er janvier 2019.
Je reste bien évidemment attentif aux problématiques exprimées par les français, par les élus de la République, ou par le mouvement des « gilets jaunes ». Le Gouvernement doit rapidement prendre des mesures d’apaisement, avant de se concentrer sur les réformes de fond, qui prendront en compte les difficultés quotidiennes des français.
Par ailleurs, les deux derniers paragraphes de votre courrier présentent un caractère comminatoire que je réprouve et qui ne me parait pas de nature à faire évoluer une situation qui nécessite un sens des responsabilités et une volonté d’apaisement pour trouver des solutions acceptables pour tous.
Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de ma considération distinguée.
Hugues Saury
Sénateur du Loiret